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Son
engagement maritime :
Olivier,
c'est la liberté d'entreprendre, de créer, d'aller
au bout des choses. Se donner les moyens de faire, puiser son
énergie pour réussir ce qu'il s'est fixé
comme objectif.
Aussi, le choix de ne plus participer à des courses "plus
classiques" s'est naturellement imposé compte tenu
des axes fixés par les instances dirigeantes.
"Depuis les années quatre-vingt, je ne le souhaite
plus. Les organisateurs ont modifié les règles en
torturant les longueurs, en faisant la pluie et le beau temps
pendant que nous étions en mer à faire du bateau.
Ce monde-là ne m'intéresse plus. L'argent a changé
bien des choses. Ce n'est bien sûr plus la belle époque
de Tabarly et Pen-Duick. Dans ce métier de marin, les arrivistes
ont pris le pas sur les aventuriers. Pour ce qui me concerne,
j'ai encore envie d'avoir le coeur qui bat".
Rappelons
qu'en interdisant la publicité sur les bateaux, le Royal
Ocean Racing Club avait incité les Français à
créer la voile "open". Au nom de la sécurité,
ces derniers venaient de limiter la longueur des multicoques à
60 pieds (18,26 m), condamnant ainsi une partie de la flotte.
"On passait d'un monde de folie, d'émotions, de
rêves, à un monde de règles qui ne me faisait
plus battre le cur", dit-il. Avec Poulain, son
trimaran hors la loi rebaptisé "Un Autre Regard",
il se lance, en 1988, dans un tour du monde en solitaire que seuls
Alain Colas et Philippe Monnet avaient osé tenter avant
lui sur un multicoque. Cent vingt-cinq jours durant, il s'émerveille
devant "les couleurs du ciel lors d'un lever ou d'un coucher
de soleil sur l'horizon", puis découvre "la
solitude absolue dans la beauté sauvage et hostile des
40es Rugissants", mais aussi "l'odeur âcre
de la peur" et le "sentiment d'impuissance"
dans le "chaos hurlant" d'une tempête de
l'océan Indien. "J'ai toujours été
prêt à mourir pour la voile, dit-il. D'autres se
contentent d'en vivre..."
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C'est
une réception pour fêter Titouan Lamazou (vainqueur
du Vendée Globe) qui va ranimer la flamme. L'heure est au
projet d'un tour du monde en moins de 80 jours. Marc Van Peteghem,
l'architecte de Poulain, assure qu'il suffirait de rallonger le
trimaran et de le doter d'un gréement plus puissant pour
tenter le pari (voir page Evolution
du trimaran).
D'abord agacé par la volonté de Lamazou, Florence
Arthaud et Bruno Peyron de réguler le Trophée Jules
Verne, Olivier de Kersauson plonge dans ce défi.
Profitant d'un reportage pour Match sur la Coupe de l'America à
San Diego, il parvient à convaincre Raul Gardini, l'armateur
d'Il-Moro-di-Venezia, d'investir 2,3 millions d'euros.Le 25 janvier
1993, avec quatre équipiers, il quitte Brest sur Charal.
L'aventure prend fin après vingt-trois jours, flotteur tribord
déchiré par un growler à l'entrée de
l'océan Indien.
Olivier de Kersauson obtient de Jérôme Monod 1 million
d'euros pour repartir, le 16 janvier 1994, en duel avec Peter Blake.
Lyonnaise-des-Eaux-Dumez est de retour à Brest après
77 jours, mais il a été devancé d'un peu plus
de deux jours par Enza-New-Zealand. La troisième tentative
sur le vieux trimaran, rebaptisé Sport-Elec, sera la bonne.
Il décroche en même temps pas moins de 21 records
océaniques.
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Son
analyse sur ses tours du monde
:
Le
premier, à bord de Pen-Duick VI en 1973, fut celui de la
découverte, avec le bouclier en métal protégeant
le cockpit des déferlantes - on ne connaissait rien au Grand
Sud. Il fut aussi marqué par la disparition de Dominique
Guillet.
Aussitôt revenu à terre, j'ai affrété
Kriter II avec l'aide de Michel Etevenon, pour la Clipper Race en
deux étapes. Nous avons gagné Londres-Sydney, puis
cassé notre gouvernail dans le Pacifique. A bord, j'avais
un équipage de prise... Nous avons terminé la peinture
au large des Açores. Ce n'était pas un bateau idéal,
mais on a rarement le bateau de ses rêves et il faut essayer
d'être meilleur avec le bateau dont on dispose. Sinon on ne
fait jamais rien.
Pour mon troisième tour, en 1988, c'était logique,
je suis parti en solitaire à bord du trimaran Poulain. Il
n'y avait pas de course organisée à l'époque.
J'avais envie d'être seul et de le faire sans escale. Naviguer
en vraie solitude. Par endroit, il n'y a pas un être humain
à moins de 5 000 milles et c'est formidable de pouvoir vivre
ça. J'ai réalisé le temps de 125 jours, rejoignant
ainsi le club de ceux qui ont réalisé le tour du monde
en solo et en multicoque.
Ensuite il y a eu Charal en équipage, en 1992. Il s'agit
de Poulain remanié (voir page Evolution
du trimaran). En fait, nous avons déchiré
un flotteur sur la glace en entrant dans l'océan Indien et
nous avons ramené le bateau à Brest.
En 1994, c'est la deuxième tentative avec Lyonnaise-des-Eaux-Dumez
(77 j 5 h 3 min 7 s). Ils seront devancés par Peter Blakeà
la tête de Enza-New-Zealand (74 j 22 h 17 min 22 s).
Mais en 1997 : l'année "Kersau" arrive. Il s'empare
enfin du Trophée Jules-Verne avec ses 6 équipiers
sur Sport-Elec en 71 j 14 h 22 min 8 s (voir page Equipage).
C'est donc son septième tour du monde qu'il est en train
de courir sur Géronimo.
"Géronimo est une référence à mon
enfance, explique le skipper. J'étais un Indien quand je
posais des pièges et que je parcourais les bois avec ma fronde.
Mais c'est aussi un symbole fort de liberté, de symbiose
avec la nature. J'ai de l'admiration pour les gens qui savent dire
non pour défendre leur culture."
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Son
enthousiasme à la veille de ce nouveau tour du monde :
"Lorsque
la nature nous offre un don ou une chance, nous avons le devoir
d'exceller, d'aller au bout de nos possibilités, dit-il.
Ce trimaran est le fruit de toute mon expérience de la mer.
J'ai hâte de partir avec lui sur ce parcours du Jules Verne
dont je suis totalement imprégné."
Lorsqu'on évoque le potentiel de ce nouveau trimaran, Olivier
reste prudent et préfère retenir une notion de compromis
entre la vitesse et la préservation du matériel :
"A quel moment, faut-il lever le pied ? C'est la question.
Il faut toujours pousser, mais pas plus de quarante-huit heures,
sinon tout le mode est KO et c'est la porte ouverte à la
moindre erreur. Comme vous n'êtes pas sûrs d'avoir du
vent sur tout le parcours, quand vous en avez, vous en profitez
au maximum. Mais chaque noeud de vitesse supplémentaire coûte
énormément. Les voiles se décousent, le gréement
souffre, la coque prend des choc répétés. C'est
cette phase d'accumulation qui est dangereuse. Je sais un peu réguler
ça, car j'ai de l'expérience. Pour gagner, il faut
aller vite. Mais pour gagner, il faut arriver".
Son bateau, il le connait par coeur. "Sur chaque pièce,
il y a un raisonnement. Le poids, la taille, est-ce la bonne pièce,
quelle est sa meilleure place ? On a fait un plan à l'échelle
1, comme Ferrari. Sur un prototype, tous les jours se pose une question
nouvelle, un choix de technologie de fabrication, un impératif
du bureau d'études. C'est passionnant. Ce bateau représente
plus de 100 000 heures de travail avec cinquante personnes à
plein temps. On s'est servi de tout ce qu'on avait accumulé
comme données pendant deux tours du monde. Une mesure tous
les dix milles. On sait que le tour du monde qu'on va faire est
à 10 % près similaire à tout ce qu'on a mis
en diagramme. Cela nous a permis d'avoir une analyse logique, de
ne pas privilégier le côté émotionnel
de la mémoire, et donc de décider comment on allait
typer ce bateau".
C'est
toute cette connaissance qui en fait aujourd'hui un des capitaines
parmi les plus respectés. Il a appris à se plier à
la discipline de la mer. Il se réjouit aussi d'être
à la tête d'un équipage heureux, perfectionniste
dont il attendra un engagement total, avec qui il pourra alors partager
la satisfaction d'une manoeuvre difficile et judicieusement orchestrée.
Comme skipper, Kersauson est craint mais sa fierté d'homme
libre est respectée. Son bord a le plus souvent été
recherché par un petit noyau d'hommes de mer exigeants, épris
d'absolu, épousant le même attrait pour la haute mer
et les grandes virées en solitude.
Si
quelqu'un me dit un jour : " On vous donne cent millions
de dollars et vous changez d'activité. Je réponds
non, sans même réfléchir. Je me demande parfois
comment est fait le cerveau de celui qui n'a jamais vu la mer. Si
j'étais l'homme le plus riche du monde, je ferais ce que
je suis en train de faire. J'aime cette vie, elle m'amuse, elle
m'intéresse, elle m'enthousiasme. "
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BON
VENT A OLIVIER ET A SON EQUIPAGE !
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